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    La vielle heure

     

     

     

    Venez ! Venez ! Venez !

    Allons !

    maintenant il est l’heure

    allons dans la nuit !

    Ô hommes supérieurs,

     il est près de minuit,

     je veux donc vous dire quelque chose à l’oreille,

     quelque chose que cette vieille cloche m’a dit à l’oreille,

    avec autant de secret, d’épouvante et de cordialité,

    qu’a mis à m’en parler cette vieille cloche de minuit qui a plus vécu qu’un seul homme,

    qui compta déjà les battements douloureux des cœurs de vos pères

     hélas ! hélas !

    comme elle soupire !

    comme elle rit en rêve !

     la vieille heure de minuit,

    profonde, profonde !

    Silence ! Silence !

    On entend bien des choses qui n’osent pas se dire de jour ;

     mais maintenant que l’air est pur, que le bruit de vos cœurs s’est tu,

    lui aussi, maintenant les choses parlent et s’entendent,

    maintenant elles glissent dans les âmes nocturnes dont les veilles se prolongent

     hélas ! hélas !

     comme elle soupire !

     comme elle rit en rêve !

    n’entends-tu pas comme elle te parle à toi secrètement,

     avec épouvante et cordialité,

    la vieille heure de minuit, profonde, profonde

    Ô homme, prends garde !

     

    Friedrich Nietzsche

     


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